Aujourd’hui, congé de philo! Au lieu de cela, ami, je prends ta main et je t’entraîne, le temps d’un article, dans mon délire imaginatif, ou peut-être dans mon délire tout court tant il est vrai qu’un Homme doit parfois cesser d’être “sensé” de la manière ordinaire afin de trouver un “sens” nouveau aux êtres et aux choses. “Sens” me fait penser à “sens des mots” et par extension à ÉTYMOLOGIE (origine des mots) et moi qui adore les mots, je n’ai pu m’empêcher de philosopher à leurs sujets.
Certaines personnes ont la parole facile, et j’entends encore Dalida: “…parole, parole…”. Comme dit le proverbe “la parole est d’argent, mais le silence est d’or” (MOTus et bouche cousue, dit-on aussi): il ne faut pas parler pour ne rien dire car les mots ont du pouvoir. Il y a quelque mois une amie blogueuse m’a rappelé une chose très vraie, mais que j’avais tendance à oublier: “Un seul sourire, un seul mot d'amitié et encore mieux d'amour, et tous les nuages sont dissipés” et le dictionnaire en ligne Évène constate aussi la puissance des mots:
Nous savons que les mots français viennent surtout de deux langues mortes (le latin et le grec) et nous avons tendance à penser que toutes les langues mortes sont égales entre elles (“Bien sûr voyons! Une langue morte ne peut pas être plus morte qu’une autre!”) Sauf que c’est faux car nous manquons de la perspective nécessaire pour juger de façon adéquate. Au temps où un quidam pouvait déambuler en toge romaine sur la Via Liber et saluer son voisin d’un AVE AMICUS MEUS, le sanscrit était déjà une langue morte.
Parler des mots, oui, mais de quels mots? L’Homme est un être mental: aujourd’hui je parlerai donc du mot MENTAL. On notera tout d’abord que le mot français MENTAL vient du latin MENS, qui lui, vient du sanscrit MANAS (मनस्), et le Projet Babel dit du mental que“Les deux principaux ancêtres latins de cette famille sont le nom mens, gén. mentis, «esprit, intelligence» et le verbe mentiri, «mentir»”.
Cette double étymologie devrait nous mettre la puce à l’oreille quant à la nature binaire du mental; cela permet à l’Homme de distinguer deux choses là où il y a UNITÉ, mais du coup ça le rend incapable de percevoir cette unité (explication plus bas). C’est à la fois une bonne et une mauvaise chose, la nature du mental le poussant, non pas à chercher ce qui est vrai (il n’est pas fait pour ça), mais à démontrer que ce qu’il croit qui est vrai, est effectivement vrai (autrement dit, qu’il a raison).
Un exercice mental que l’on donne aux étudiants en droit consiste à prouver qu’une personne est innocente; puis à prouver que la même personne, ayant fait la même chose, est coupable. Cela donne une incomparable souplesse mentale. Cela montre aussi que le mental ne cherche pas à connaître la vérité (il en est bien incapable, le pauvre), mais à démontrer ce qui est vrai POUR LUI (autrement dit à prouver –par des “…parole, parole…”- que ce qu’il dit est plus vrai que ce que dit l’avocat d’en face).
Si SA vérité est différente de la vérité de l’autre, cela suggère qu’il n’y a pas UNE vérité, indépendante de tout ce qu’on peut en penser, mais que chacun a la sienne (d’où: c’est ENSEMBLE qu’on est le plus fort). Dans un sens, MENTAL = MENSONGE. Il faut donc sortir du mental (et non pas l’abolir) pour sortir du mensonge.
Et comme il y a 6 milliards d’êtres MENTAUX, il y a donc 6 milliards de vérités dans le monde. La spiritualité, remarquant ce “mensonge”, a dit que “le monde est illusion” et a cherché des moyens de dissiper cette illusion. Qu’est-ce qui reste quand il n’y a plus d’illusion? Est-ce que le monde disparaît? Bien sûr que non! C’est le mensonge (mentire) qui disparaît. Le monde, lui, devient vrai. En fait, ce n’est pas tout à fait exact. Le monde ne devient pas vrai: IL EST VRAI, il a toujours été vrai, il n’a jamais cessé d’être vrai. L’illusion ne se dissipe que pour nous, les êtres humains. La matière telle qu’elle est réellement est libre.
Il n’y a que l’Homme pour ne pas voir LE monde, mais SON monde, l’illusion (ou le “mensonge”) n’existe QUE pour lui. Ce mensonge est sur le point de se dissiper collectivement, pour TOUT LE MONDE –sans distinction morale de méritoire ou non- (c’est le vrai sens du mot apocalypse, qui ne signifie pas FIN DU MONDE ou FIN DE L’HOMME, mais RÉVÉLATION car l’autre nous sera transparent, “révélé”). Quand l’illusion –l’APPARENCE- est dissipée, qu’est-ce qu’on voit? On voit le monde tel qu’il est: un véritable “paradis terrestre”. Ce qui attend l’Homme est plus beau que ses plus beaux contes de fée.
Évidemment, le mental ne ment pas volontairement. En fait un de ses deux ancêtres latins (mentior, mentiri) veut litt. dire mentir par ignorance/omission, tromper non sciemment. Autrement dit, le mental est si limité qu’il “prend des vessies pour des lanternes” et a réussi à nous convaincre que ces vessies sont en fait des lanternes. Par exemple, le mental (ou plutôt une de ses facultés, la raison) nous a convaincu que “l’âme" –que j’appelle le vrai moi, et dont la spiritualité dit qu’il est “moi plus que moi”- n’existe pas, simplement parce que lui est INCAPABLE de la voir.
En fait le mental est excellent pour AGIR, mais pour CONNAÎTRE la réalité des êtres et des choses, il est aussi aveugle qu’une taupe. C’est un inventeur hors pair (s’il a pu inventer la batterie électrique, c’est parce qu’en observant l’énergie il y a facilement distingué un pôle positif et un pôle négatif). Mais pour CONNAÎTRE, il ne vaut rien (pas tout à fait rien, mais presque).
Bien sûr, pour connaître il est de loin meilleur que les émotions, mais comparé à la faculté inouïe qui tente de se frayer un chemin pour s’établir dans l’Homme, le mental est tout petit, infime “comme un grain de riz” dit l’upanishad. Si c’est la connaissance que l’on cherche, alors il faut aller au-delà du mental car là, le mental ne peut plus rien pour nous (même si lui se croit encore très capable).
Il y a une centaine d’années Sri Aurobindo écrivait dans un raccourci saisissant (dans Pensées et Aphorismes): “Le mental fut une aide, le mental est l’obstacle”. Qu’est-ce que cela peut bien vouloir dire? Nous savons que grâce au mental, l’Homme a pris la tête de l’évolution et domine partout sur la planète (“il est en haut de la chaîne alimentaire” dit la science). Mais maintenant le mental, qui a permis à l’Homme de progresser loin au-delà de l’animal, se croit si important et si nécessaire pour l’Homme, qu’il l’empêche de progresser: de nos jours la faculté mentale est devenue un carcan pour une majorité d’Hommes qui ont la capacité d’aller plus loin.
“La matière est libre”, qu’est-ce que ça veut dire? Beaucoup de belles choses, mais avant tout que nous en sommes PRISONNIERS (c.a.d. que nous sommes LIMITÉS par la perception de troglodyte du mental); c’est pourquoi le but de la spiritualité est de nous LIBÉRER (mukti, moksha). Mais libérer de quoi? Bien sûr si je ne sens pas que je suis PRISONNIER DE (limité par) la matière telle que je la connais, je n’ai aucune raison de vouloir m’en LIBÉRER. On doit savoir que ce n’est pas du tout de la matière qu’il faut se libérer, mais du “mensonge” qui nous empêche de voir la matière telle qu’elle est.
Présentement on sait ce qu’est la matière (ou plutôt on CROIT le savoir): une personne ne peut pas être à Montréal et à Osaka en même temps; en vertu de la loi de gravité, un corps qui flotte dans l’air est impossible; tout le monde sait qu’on ne peut pas être continuellement heureux: il y a alternance de moments heureux et de moments malheureux.
Il faut savoir qu’il n’y a pas un gramme de vrai dans cela. C’est complètement faux. La matière est (et peut) BEAUCOUP plus que ce qu’on en croit. Il n’est pas question de s’illusionner ou d’imaginer des choses, alors, qu’est-ce qu’on sait VRAIMENT de la matière? On sait que tout est fait d’atomes (ça veut dire toi, moi, et tout le monde; et puis la montagne, la maison et Fido).
On sait aussi que les atomes, ça ne reste pas sagement sur place à former mon corps, ton corps, son corps, et il n’y a pas des atomes français, des atomes canadiens et d’autres japonais: non, c’est partout, et ça voyage continuellement partout. Alors, être à plusieurs endroits en même temps, savoir -voir et entendre- tout ce qui se passe partout (et bien d’autres choses merveilleuses) est non seulement possible, mais tout à fait naturel (sauf pour le mental, qui décidément est borné). Et dire que nous nous fions à lui.
Le mental était très bien au début, quand l’Homme était à peine sorti du singe; mais l’Homme a grandi, aujourd’hui le mental est devenu un boulet que nous traînons et qui nous empêche d’avancer/progresser (du moins une majorité d’êtres humains). Un petit pantalon d’enfant, c’était très bien quand nous étions enfants, mais pas aujourd’hui. Aujourd’hui
IL FAUT ALLER AU-DELA
1 commentaire:
... Comment aller au-delà ?...
Telle est une question du mental...
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