«Incarner le personnage»
Dans un précédent article j’ai tenté d’inférer la nécessité de l’existence de l’âme du fait même de notre existence (voir Notre être véritable). Mais qu’est-ce que cette mystérieuse ÂME que je suis censé avoir, et surtout quelle relation a-t-elle avec moi? Pour expliquer cela il m’est apparu approprié d’utiliser l’exemple de l’acteur et son personnage.
Tout d’abord, une évidence: l’acteur n’est pas AUTRE que son personnage, c’est la même personne. Si l’on comprend que l’acteur représente l’âme éternelle et divine, et que MOI, c’est le personnage, alors il devient évident que cette âme est «plus moi que moi» (et que ce n’est pas le personnage qui a un acteur, mais plutôt l’acteur qui incarne le personnage). En fait lorsque j’en deviens conscient, je n’ai pas l’impression de connaître une «autre personne» mais d’être devenu «le vrai moi», d’être complet, réalisé. Et ça ne détruit rien de ce que je suis, ça s’ajoute. Je suis donc plus moi que moi. L’impression est que j’étais adolescent et je suis devenu adulte; et être adulte, c’est cent fois mieux qu’être adolescent, non? On a donc tout avantage à devenir conscient de ce moi véritable qu’est l’âme.
En fait l’âme est DÉJÀ consciente d’être moi, c’est moi qui ne sais pas qu’en réalité je suis l’âme (tout comme l’acteur SAIT qu’il joue un personnage). Bientôt les conditions seront beaucoup plus faciles pour faire cette découverte en tant qu’espèce, simplement parce que le temps est venu (auparavant ce ne pouvait être qu’un accomplissement individuel, comme le ferait un «sage»).
On dit de l’acteur qu’il «entre dans la peau de son personnage», qu’il «habite, incarne son personnage». En fait ces deux (acteur/personnage) sont de nature très différente: le personnage n’a qu’une brève existence, une sorte de costume ou de masque1 que l’acteur endosse le temps d’un rôle; cela implique, naturellement, que l’acteur vit BEAUCOUP plus longtemps que son personnage (on peut même dire qu’il lui survit). De cette évidence on peut déjà comprendre que cette âme que je ne connais pas vit beaucoup plus longtemps que le petit moi qui dure une centaine d’années puis disparaît.
Mais ce n’est pas tout. L’acteur peut exister sans le personnage, mais ce dernier n’existe pas sans un acteur qui lui prête vie. Si l’acteur correspond à l’âme, on peut en conclure que celui que je crois que je suis est le personnage, et aussi que sans l’âme (= le véritable moi) je n’existerais pas.
Puisque je suis le personnage, certains en déduisent faussement que je suis la marionnette de l’âme. Ils se trompent complètement; en fait, c’est tout le contraire, et le personnage dépend des circonstances de la pièce, mais non l’acteur qui, lui, est libre. J’ai donc tout avantage à devenir conscient de l’âme qui est ma vraie nature (donc «plus moi que moi»).
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1. Dans l’Antiquité l’acteur portait un masque à la bouche très grande et proéminente (appelé per sona : résonner à travers) qui lui permettait d’être entendu partout dans l’amphitéâtre. À l’époque moderne l’acteur porte rarement un masque mais le mot PERSONNAGE est resté.
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